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De la férie

Le martyrologe du jour est l’un des plus brefs de l’année :

Dans l’île de Ponza, l’anniversaire de saint Silvère, pape et martyr. N’ayant pas voulu rétablir Anthime, évêque hérétique, déposé par son prédécesseur Agapet, il fut, à la sollicitation de l’impératrice, l’impie Théodora, envoyé en exil par Bélisaire ; il y mourut, accablé par les nombreux tourments endurés pour la Foi Catholique. A Rome, la mise au tombeau de saint Novat. Il était fils du bienheureux Pudens sénateur, frère du prêtre saint Timothée et des saintes vierges Pudentienne et Praxède, tous instruits de la Foi par les Apôtres. Leur maison, transformée en église, porte le titre du « Pasteur ». A Tomi, dans le Pont, les saints martyrs Paul et Cyriaque. A Petra, en Palestine, saint Macaire évêque. Après avoir souffert de la part des ariens beaucoup de mauvais traitements, il fut relégué en Afrique, où il s’endormit dans le Seigneur en vrai confesseur. A Séville, en Espagne, sainte Florentine vierge, sœur des saints évêques Léandre et Isidore.

Sainte Florentine, ou Florence de Carthagène (où elle était née), abbesse du monastère d’Ejica entre Séville et Cordoue. C’est son frère Léandre, ami de saint Grégoire le Grand et évêque de Séville, qui rédigea la règle. Isidore succéda à Léandre au siège de Séville. Ils avaient encore comme frère saint Fulgence, évêque… d’Ecija.

Insolite

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En visite officielle en Corée du Nord, pays au régime très officiellement athée et antireligieux, Vladimir Poutine a voulu se rendre à l’église orthodoxe russe… Laquelle a été construite par Kim Jong Il entre 2003 et 2006. L’ambassadeur de Russie Andreï Karlov s’y est marié (puis il est devenu ambassadeur en Turquie où il a été assassiné par un jihadiste anti-Assad).

Photo prise le jour de Pâques dernier :

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L’imposture jusqu’au bout

Le communiqué final de la « Conférence de haut niveau » (puisque ce n’était décidément pas un « sommet »), qui s’est tenue en Suisse sur l’Ukraine, n’a pas été signé par les représentants des pays qui le soutenaient, reconnaît le ministère suisse des Affaires étrangères auprès de l’agence russe Ria Novosti : on ne peut donc pas vous fournir une copie du document signé…

Les vieux à la casse

Les gazettes :

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En fait, une voiture avec cinq « jeunes », roulant à grande vitesse sur une petite route, s’est déportée sur la gauche à la sortie d’un virage et a percuté une voiture qui roulait tranquillement en sens inverse, tuant sur le coup le conducteur et la passagère, 80 ans et 85 ans. Mais les vieux, on s’en fout…

Acharnement

La cour d’appel d’Aix-en-Provence a confirmé hier la relaxe de Stéphane Ravier, poursuivi pour un tweet de juillet 2021 :

« Théo, 18 ans, assassiné hier par un Sénégalais à #ClayeSouilly. L’immigration tue la jeunesse de France »

Une amende d’au moins 5.000 euros pour diffamation à caractère raciste était requise contre lui. Plusieurs lobbies s’étaient constitués parties civiles, dont la Licra.

Le sénateur des Bouches-du-Rhône avait été relaxé en première instance. Mais le parquet avait fait appel…

L’acharnement continue néanmoins. Hier avait lieu l’audience du procès intenté contre des cadres du RN, pour « complicité de provocation à la discrimination », après la publication en… 2014 d’un « Guide de l’élu FN » prônant la « priorité nationale »…

6.000 chrétiens…

La Croix a publié une tribune « Au nom de notre foi, nous voterons contre l’extrême droite. » Signée de quelque « 6.000 chrétiens ».

Un certain Bastien a montré que n’importe qui pouvait signer (éventuellement plusieurs fois) la tribune, sans qu’il y ait le moindre contrôle. Lui et ses amis ont signé « Jean Raspail, écrivain » (mort en 2020 et qui n’aurait certainement pas signé de son vivant…), « Jawad Bendaoud, aubergiste » (l’homme qui avait hébergé des terroristes du 13 novembre), « Jean-Michel Trogneux, professeur », « Jacques Mesrine, troubadour », « Gigliotti Iolanda Cristina (aka Dalaida), citoyenne concernée », « Yvette Martin, paroissienne de Saint-Merry-hors-les-murs », etc.

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« En fait, cela nous montre (encore une fois) que ce genre de tribune ne vaut pas grand-chose : – parce que n’importe qui peut la signer ; – parce que ce n’est représentatif de rien du tout ; – parce que le public qui l’a signé n’a finalement rien de surprenant : qui est surpris de voir des centaines de responsables de communautés, mouvements, associations, journaux clairement marqués à gauche ? – parce que la quantité ne fait pas la qualité (au contraire). On peut cependant être très très surpris de voir certains signataires mettant en avant leurs responsabilités dans des communautés ou des associations… Ont-ils conscience que, dans leurs membres, et comme partout, 1/3 votent RN ? Et ils nous parleront d’unité, demain. »

Les suites du COVID en Amérique

Le procureur général du Kansas, Kris Kobach, annonce qu’il porte plainte contre Pfizer pour de « multiples déclarations trompeuses » concernant les risques pour la santé et l’inefficacité de son « vaccin » contre le COVID.

« Pfizer a trompé les habitants du Kansas sur les risques des vaccins, notamment pour les femmes enceintes et pour la myocardite. En outre, Pfizer a prétendu que son vaccin protégeait contre les variants du COVID, alors que les données montrent le contraire. Le géant pharmaceutique a également suggéré que son vaccin empêchait la transmission du COVID, mais a admis par la suite qu’il n’avait jamais étudié la question de savoir si son vaccin arrêtait la transmission. »

La plainte allègue également que Pfizer a agi avec les responsables des médias sociaux pour censurer les discours critiques et a refusé de participer au programme de développement de vaccins du gouvernement fédéral, l’Opération Warp Speed, pour éviter la surveillance du gouvernement.

Parmi ses tentatives pour tromper le public, Pfizer a maintenu sa propre base de données d’effets indésirables, qui comprenait des cas non signalés au système fédéral VAERS (Vaccine Adverse Event Reporting System), mais « n’a pas publié les données d’effets indésirables de sa base de données ». En outre, Pfizer « n’a pas révélé que son essai n’incluait que des personnes en bonne santé et excluait les personnes en mauvaise santé » et, par conséquent, « ne disposait pas d’une base raisonnable pour affirmer que le vaccin était sans danger pour les personnes chez qui le COVID-19 avait été diagnostiqué, qui étaient immunodéprimées, enceintes ou qui allaitaient ».

La plainte soutient que les fausses déclarations de Pfizer, qui ont permis à l’entreprise de gagner 75 milliards de dollars en deux ans, constituent des violations de la loi du Kansas sur la protection des consommateurs.

En Floride, un grand jury constitué par le gouverneur Ron DeSantis enquête actuellement sur la fabrication et le déploiement des vaccins COVID. En février, il a publié son premier rapport intérimaire, qui a déterminé que les confinements ont fait plus de mal que de bien, que les masques étaient inefficaces pour arrêter la transmission du COVID, que le COVID était « statistiquement presque inoffensif » pour les enfants et la plupart des adultes, et qu’il est « très probable » que les chiffres des hospitalisations dues au COVID aient été gonflés.

En avril, le CDC (Centre de prévention et de contrôle des maladies) a été contraint de publier, sur décision de justice, 780.000 rapports d’effets indésirables graves qui n’avaient pas été divulgués auparavant.

Un blasphème de la Fierté

Le lobby LGBT Outreach du Père James Martin publie un article sur « Le lien entre la Fierté et le Sacré-Cœur de Jésus ». (La Fierté – Pride – avec une capitale, c’est celle de remuer son pénis dans l’anus du voisin). L’article est de Robert Bordone, professeur de droit à Harvard pendant 20 ans, fondateur du Programme clinique de négociation et de médiation de Harvard, membre de « l’équipe ministérielle LGBTQIA » du Centre Pauliste de Boston. C’est une réponse à Martha-Ann Alito, femme du juge à la Cour suprême, qui disait vouloir faire flotter un drapeau en l’honneur du Sacré-Cœur de Jésus pendant le mois de juin pour protester contre l’immoralité sexuelle affichée par les LGBT qui arborent le drapeau de la « fierté » arc-en-ciel.

« En tant que catholique homosexuel, j’ai été particulièrement heurté par l’idée que le message du Sacré-Cœur de Jésus et le drapeau de la Fierté s’opposeraient d’une manière ou d’une autre. Au contraire, le message du Sacré-Cœur de Jésus et le drapeau de la Fierté me semblent très proches. (…) Au fond, le drapeau de la Fierté signale à tous que l’amour est l’amour. C’est un message d’inclusion et d’appartenance universelles, un message si essentiel à la mission de l’Église et à la communication de l’amour de Dieu pour tous les peuples. Ce message d’accueil et d’amour universels est exprimé par l’exhortation constante du pape François : « Todos, todos, todos ! ». (…) La dévotion au Sacré-Cœur est un rappel et une invitation à connaître et à ressentir l’amour de Dieu dans notre vie. Le drapeau de la Fierté est une version séculière de ce message, un signe physique qui espère nous rappeler et démontrer la profondeur et la légitimité d’un amour qui est pleinement inclusif et accueillant, qui vous embrasse et vous accepte pour qui vous êtes, quelle que soit la façon dont vous vous identifiez. »

Robert Bordone ne fait que reprendre ce que le P. James Martin (nommé par François consultant auprès du Secrétariat romain pour la communication et invité particulier du pape au synode sur la synodalité) écrivait en 2022 :

« Au fond, donc, ces deux commémorations ont à voir avec l’amour. Le Sacré-Cœur nous rappelle comment Jésus a aimé : pleinement, ouvertement, radicalement, jusqu’à sa mort. Dans les innombrables images du Sacré-Cœur, son propre cœur est toujours exposé : sanglant, vulnérable, proche de nous. La Fierté est aussi une question d’amour. Pas seulement l’amour que les personnes LGBTQ ont les unes pour les autres, mais l’amour que la société a pour elles, et l’amour que Dieu a pour elles. »

L’Eglise Titanic

Le lendemain même de la rumeur dont faisait état Rorate Caeli d’une prochaine interdiction totale de la liturgie traditionnelle dans l’Eglise latine, le blog Messa in latino a publié une grande interview du Professeur Andrea Grillo, qui est l’actuel super-gourou de la liturgie à Rome, inspirateur notamment du motu proprio Traditionis custodes. En voici la traduction intégrale, car il est important de voir à quel point ces gens-là travaillent diaboliquement contre la tradition, donc contre ce qui reste de l’Eglise catholique. La violente et réitérée condamnation de Benoît XVI – et aussi de saint Pie V – est impressionnante, son arrogance et son mépris, dont la fin est un véritable feu d’artifice, le sont également.

D’autre part, aujourd’hui est célébrée la dernière messe traditionnelle à la cathédrale de Melbourne. Il y avait une messe le mercredi à 17h30, elle est supprimée par Rome, et les autres messes traditionnelles célébrées dans deux autres églises seront sans doute supprimées dans deux ans, au terme d’un processus soviétique. La lettre comminatoire du Dicastère du Culte divin (sic) date de janvier dernier. On en trouvera également ci-dessous une traduction, car il faut savoir à quelle tyrannie on a affaire. (Outre le nouvel affront post-mortem au cardinal Pell, on imagine aussi la tête des orthodoxes voyant à quel point l’ecclésiologie de l’Eglise de Rome est dévoyée, quand un simple « secrétaire » peut donner des ordres à un archevêque sur un point de pastorale locale…)

L’interview du professeur Grillo.

Messainlatino : – Pourquoi, comme il nous semble du moins, ne veut-on pas, à tout prix, donner un espace libre dans l’Eglise catholique aux traditionalistes fidèles à Rome (comme à tant d’autres mouvements laïcs), qui ne sont que des fidèles à rééduquer ?

Prof. Grillo – La première question contient de nombreuses inexactitudes qui sapent le sens même de la question. Je vais essayer de les illustrer une à une. Ceux que vous appelez « traditionalistes fidèles à Rome » sont en réalité des personnes qui, pour diverses raisons, sont en rupture avec Rome, et non dans une relation de fidélité. L’élément de contradiction ne concerne pas simplement une « forme rituelle », mais une manière de comprendre les relations à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église. Tout commence par le malentendu généré (en toute bonne foi, mais avec un jugement complètement erroné) par le MP Summorum Pontificum, qui avait introduit un « parallélisme rituel » (entre NO et VO) qui n’a aucun fondement systématique ni pratique : il n’est pas théologiquement fondé et génère des divisions plus grandes que celles qui existaient auparavant. L’idée de « fidélité à Rome » doit être remise en question : pour être fidèle à Rome, il faut acquérir un « langage rituel » selon ce que Rome a communément établi. On n’est pas fidèle si on a un pied dans deux chaussures. Avoir montré cette contradiction est le mérite de TC, qui rétablit l’unique « lex orandi » en vigueur pour toute l’Eglise catholique. Si quelqu’un me dit qu’il est fidèle à la fois à NO et à VO, je lui réponds qu’il n’a pas compris ce que signifie la tradition, dans laquelle se trouve un progrès légitime, insurpassable et irréversible.

Messainlatino : – Après le pèlerinage Paris-Chartres 2024 (18.000 personnes, moyenne d’âge 25 ans, évêques diocésains, un cardinal de la Sainte Eglise romaine, large couverture médiatique) croyez-vous que l’Eglise doit maintenant penser à la pastorale du charisme ‘traditionnel’ aussi (comme d’autres mouvements qui ont surgi depuis CVII) ou peut-elle continuer à nier la vitalité massive de l’ancienne liturgie ?

Prof. Grillo – Que sont 18.000 personnes par rapport à la grande multitude de l’Église catholique ? Un peu plus qu’une secte qui vit l’infidélité comme un salut, souvent liée à des positions morales, politiques et coutumières tout à fait préoccupantes. Ce n’est pas en changeant les mots que les choses s’améliorent. On ne peut pas mettre sur le même plan la tradition et le traditionalisme. Le traditionalisme n’est pas « un mouvement parmi d’autres » (même s’il peut avoir des caractéristiques partiellement similaires à certains des mouvements les plus fondamentalistes, favorisés de manière inappropriée au cours des 40 dernières années), mais une forme de « négation du Concile Vatican II » qui ne peut qu’être fortement entravée au sein de l’expérience ecclésiale. L’Église n’est pas un « club de notaires ou d’avocats » qui cultivent leurs passions esthétiques ou planifient l’instrumentalisation de l’Église comme « le musée le plus célèbre ».

Messainlatino : – Comment se fait-il que, selon vous, surtout dans la zone anglophone et francophone, il y ait une augmentation considérable du nombre de fidèles, de séminaristes, de conversions, d’offres économiques, de familles nombreuses de la zone traditionaliste (face à une crise qualitative-quantitative évidente et grave des paroisses Novus Ordo, au moins dans le monde occidental) ?

Prof. Grillo – Nous sommes confrontés à une distorsion de la vision. La foi est confrontée, surtout dans le monde occidental, à une crise qui a commencé il y a plus d’un siècle et qui s’est accélérée de façon dramatique au cours des 50 dernières années. Mais la réponse à cette crise ne consiste pas à restaurer le mode de vie de la « société de l’honneur ». Ce ne sont pas les « cape magne » ou les « langues mortes » qui donnent de la force à la foi. Elles ne font que renforcer les liens identitaires, les formes de fondamentalisme et d’intransigeance, qui ne sont plus celles d’il y a 100 ans, mais qui prennent des figures nouvelles, où la vie post-moderne se marie à une identité « catholique » qui n’a de catholique que l’étiquette idéalisée. Il ne s’agit pas d’un phénomène ecclésial ou spirituel, mais d’un phénomène de coutumes et de formes de vie, qui n’a pas grand-chose à voir avec la tradition authentique de l’Église catholique.

Messainlatino : – Alors, dans cette situation de “pénurie de séminaristes” et de “fuite de jeunes fidèles”, pourquoi, à votre avis, le Saint-Père François semble-t-il ne considérer – du moins en apparence – que les fidèles traditionalistes (qui prient una cum Papa nostro Francisco et qui sont de plus en plus nombreux) comme des ennemis ?

Prof. Grillo – Tout d’abord, la « pénurie de séminaristes » et la « fuite des jeunes » n’est pas seulement un fait négatif : c’est le signe d’une épreuve dont toute l’Eglise a besoin. Les solutions « faciles » (remplissons les séminaires traditionalistes de jeunes gens militarisés sur le modèle des presbytres du XVIIe ou XVIIIe siècle) ne sont que des maladresses, dont les coûts sont d’abord supportés par les intéressés. Elles ne génèrent pas une vie de foi, mais souvent un grand ressentiment et un endurcissement personnel. Je ne m’inquiète pas que le pape François ressente cela comme un danger. Je suis beaucoup plus préoccupé par le fait que ses prédécesseurs y voyaient un atout. La nostalgie n’est jamais un atout, même lorsqu’elle donne l’illusion que l’Église n’a rien à réformer, mais qu’elle trouve toutes les réponses dans le passé. Pour prier « una cum papa », on ne peut pas le faire en bavardant, mais en partageant avec l’Église et le pape d’abord l’unique ordo en vigueur. Sinon, on bavarde, mais on vit en contradiction avec la tradition.

Messainlatino : – Est-il possible qu’une forme rituelle qui a été pendant très longtemps la forme « normative » de l’Eglise catholique ne puisse plus avoir sa place, à côté de tant d’autres rites de l’Eglise catholique elle-même (entre autres les rites mozarabe, ambrosien, chaldéen, saint Jean Chrysostome, arménien, etc.) Pourquoi ne pas faire coexister le charisme traditionnel dans la grande diversité des charismes ecclésiaux : « Nous ne devons pas avoir peur de la diversité des charismes dans l’Église. Au contraire, nous devons nous réjouir de vivre cette diversité » (François, 2024) ?

Prof. Grillo – Là encore, un malentendu assez lourd se manifeste sur la question. D’autre part, je reconnais que dans votre question résonne l’une des motivations les plus fortes (et les moins justifiables) qui a marqué la période (de Summorum Pontificum) à laquelle vous vous êtes attachés au point d’en faire presque votre étendard. Au cœur de ce document, en effet, il y avait un argument qui résonnait ainsi : « ce qui était sacré pour les générations passées ne peut qu’être sacré aussi pour les générations présentes ». D’où vient ce principe ? Non pas de la théologie, mais d’une émotion nostalgique à l’égard du passé. Un tel principe tend à « fixer l’Église » sur son passé. Non pas sur le « depositum fidei », mais sur le revêtement qu’elle a pris à une période, comme s’il était définitif. Qu’il y ait eu, au cours de l’histoire, des formes rituelles reconnues dans leur « altérité » dépend de la tradition « spécifique » des lieux, ou des ordres religieux. Personne n’a jamais pu penser que, sur un plan universel, il était laissé à chacun le choix de rester dans une version du rite romain ou dans la version supplantée par une réforme générale. Et on ne peut pas utiliser « par la droite » les grandes idées pauliniennes d’une manière aussi éhontée : la liberté des charismes ne peut pas être pensée comme alimentant une « anarchie par le haut », comme l’a fait de manière irresponsable la mise en œuvre du MP Summorum Pontificum. Il aurait mieux valu travailler « sur une seule table », afin que chacun puisse contribuer à enrichir « la seule forme rituelle en vigueur ». Le pari de l’amélioration mutuelle entre NO et VO était une stratégie et une théologie tout à fait inadéquates, alimentées par l’abstraction idéologique.

Messainlatino : – Vous avez beaucoup critiqué la liturgie traditionnelle. Pensez-vous que les fidèles qui la préfèrent ont également le droit de formuler des critiques similaires à l’égard de la réforme liturgique, ou pensez-vous que l’analyse critique de la liturgie ne peut aller que dans le sens du courant théologique dont vous êtes un représentant autorisé ?

Prof. Grillo : Je ne raisonne pas en termes de « factions » ou de « partis ». J’essaie seulement de lire la tradition et de découvrir ce que nous pouvons faire et ce que nous n’avons pas le droit de faire. Tout le monde peut élaborer de manière critique chaque passage de la tradition. Ce qui m’intéresse, ce sont les passages qui font l’objet d’une argumentation. Les arguments des traditionalistes sont faibles, car ils nient à la tradition ce qui la qualifie le mieux, à savoir son aptitude au changement. Ceux qui contestent la réforme liturgique ont tout à fait le droit de s’exprimer, mais ils ne peuvent pas s’attendre à ce que leurs arguments soient « auto-démonstratifs ». Par exemple, on ne peut pas déduire de la critique de la « réforme de la Semaine Sainte » le droit de recourir aux rites antérieurs à « toute réforme » du Triduum, c’est-à-dire aux rites antérieurs aux années 1950. Ceux qui agissent ainsi non seulement ne contribuent pas au débat ecclésial, mais se placent objectivement en dehors de la tradition catholique et, même s’ils réaffirment leur « fidélité au pape », la nient en fait. Il n’est pas si facile d’éviter de devenir « sédévacantiste », en acte avant l’affirmation.

Messainlatino : – Une dernière question. Nous pensons que la réforme liturgique a globalement échoué (comme le montrent les séminaires et les églises vides, les paroisses et les diocèses fusionnés, etc.), et qu’elle a contribué à la crise de l’Église. Nous pensons également que pour la défendre, nous essayons de dépeindre comme des résultats attendus ce qui nous semble être des conséquences négatives. Comment essayez-vous de nous faire changer d’avis ?

Prof. Grillo : – Il y a des cas, dans le débat théologique et liturgique, où l’utilisation d’arguments peut être vouée à l’échec. Je n’abandonne jamais (je ne serais pas théologien si je ne faisais pas confiance à l’argumentation) mais je comprends la difficulté. J’utilise dans ces cas des raisonnements qui sont souvent difficiles à comprendre. Même le célèbre journaliste Messori est souvent tombé dans la même erreur que vous. Vous dites « la réforme liturgique a échoué » et vous raisonnez en termes de chiffres. Vous pensez ainsi : si quelque chose dans l’histoire est avant quelque chose d’autre, alors ce qui est avant est la cause de ce qui vient après. Il n’est donc pas difficile de croire que la responsabilité des maux des années 70-80-90, jusqu’en 2024, incombe au Concile Vatican II et en particulier à la réforme liturgique. Ce raisonnement n’est cependant pas fondé historiquement. La crise de l’Eglise est largement antérieure à l’émergence de la pensée liturgique : Guéranger et Rosmini parlent d’une « crise liturgique » dès 1830-40. Festugière au début du XXe siècle dit « personne ne sait plus ce que c’est que célébrer »… mais non seulement vous ignorez tout cela, mais vous avez tendance à simplifier les choses et à penser que « si la réforme n’avait pas eu lieu » nous serions encore dans l’Eglise des années 1950. Pour vous faire changer d’avis, je pense qu’il faut d’abord réfléchir à la relation entre la liturgie et l’expérience ecclésiale. Être disciple du Christ, ce n’est pas adhérer à un club de la haute société ou à une association pour parler une langue étrangère ou pour s’identifier au passé, en cultivant des idéaux réactionnaires. La tradition n’est pas le passé, mais l’avenir. L’Église et la foi étant une affaire sérieuse, elles ne peuvent être réduites à l’association de ceux qui cultivent la nostalgie du passé.

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L’interdiction de la messe à Melbourne.

Excellence,

Le Dicastère a bien reçu votre lettre du 27 juin 2023 dans laquelle vous nous informez des mesures qui ont été prises dans votre diocèse pour mettre en œuvre le Motu proprio Traditionis custodes. Vous avez également été en mesure de nous fournir des détails supplémentaires au cours de votre visite à nos bureaux le 24 janvier, ce dont nous vous sommes reconnaissants. Il est évident que vous avez cherché à vous assurer que la direction établie par le Saint-Père pour l’Église universelle est observée par l’Église locale de Melbourne. Vous avez demandé qu’un certain nombre de dispenses soient accordées par rapport à l’art. 3 § 2 du Motu proprio, afin que la Messe selon le Missale Romanum de 1962 puisse continuer à être célébrée dans les églises paroissiales de Saint-Michel à Melbourne-Nord et de Saint-Philippe à Blackburn-Nord, ainsi que dans l’église cathédrale de Saint Patrick à Melbourne-Est.

Après une étude attentive des raisons pastorales présentées par Votre Excellence, nous vous envoyons le décret par lequel la dispense est accordée aux églises paroissiales de Saint Michel et Saint Philippe pour une période de deux ans. Si, à l’issue de cette période, vous souhaitez renouveler la permission, vous devrez nous envoyer une nouvelle relatio avec votre demande. Cette relatio devra préciser le nombre de participants à ces messes et relater les démarches entreprises pour conduire les fidèles attachés à la liturgie antérieure vers la célébration de la liturgie selon les livres liturgiques réformés par décret du Concile Vatican II, et qui constituent l’expression unique de la lex orandi du rite romain. La lettre apostolique du Saint-Père Desiderio desideravi sur la formation liturgique du peuple de Dieu devrait s’avérer d’une grande aide dans cette tâche, et nous avons d’ailleurs été encouragés d’entendre au cours de votre visite que vous aviez déjà organisé un séminaire pour votre clergé sur cet important document.

Tout en reconnaissant que la messe selon le Missale Romanum de 1962 a été célébrée dans l’église cathédrale depuis un certain temps, nous sommes néanmoins contraints de rejeter cette demande. Il est maintenant opportun que la direction établie par le Saint-Père soit suivie avec soin dans ce cas particulier.

Nous rappelons simplement à Votre Excellence tout ce qui est dit aux nn. 42-54 du Caeremoniale episcoporum sur l’importance de l’église cathédrale, ainsi qu’aux nn. 119 et suivants sur la messe de célébration de l’évêque diocésain. Celle-ci est décrite comme « la manifestation prééminente de l’Église locale […] lorsque l’évêque, en tant que grand prêtre de son troupeau, célèbre l’Eucharistie et en particulier lorsqu’il célèbre dans la cathédrale, entouré de son collège de presbytres et de ses ministres, et avec la participation pleine et active de tout le peuple saint de Dieu ». Il ne semble donc pas opportun que la liturgie antécédente soit célébrée dans le lieu qui devrait servir d’exemple à la vie liturgique de tout le diocèse. La cathédrale est le premier lieu où la célébration de la liturgie doit utiliser les livres liturgiques actuels, qui constituent l’expression unique de la lex orandi du rite romain.

Une solution possible pour les fidèles qui assistent à cette Messe à l’église cathédrale, et un pas supplémentaire sur le chemin indiqué par le Saint-Père, serait que la Messe soit célébrée pour eux, en latin, selon le Missale Romanum editio typica tertia (2008) au même autel où est actuellement célébrée la Messe selon le Missale Romanum de 1962. Ce serait un signe concret de leur désir d’embrasser pleinement la lex orandi unique du rite romain et une occasion pour vous, en tant que chef liturgiste du diocèse, ainsi que pour le clergé paroissial, d’assurer une catéchèse et une formation approfondies sur la profondeur et la richesse spirituelles du Missel rénové.

Si cette suggestion ne convient pas à ce groupe, et s’il n’y a pas d’autres églises non paroissiales qui conviendraient pour accueillir cette Messe, alors, à votre demande, nous pouvons autoriser l’utilisation d’une autre église paroissiale dans la ville de Melbourne qui peut servir de lieu pour la célébration de la Messe selon le Missale Romanum de 1962.

Nous sommes reconnaissants à Votre Excellence pour les mesures qu’elle prend afin d’assurer l’application correcte du Motu proprio, et nous reconnaissons les défis que cette tâche implique. Cependant, dans sa lettre aux évêques du monde entier lors de la publication de Traditionis custodes, le Saint-Père, exerçant son ministère au service de l’unité en suspendant la faculté accordée par ses prédécesseurs, a demandé à chaque évêque de partager avec lui « cette charge comme une forme de participation à la sollicitude pour toute l’Église propre aux évêques ». Nous vous assurons que nous sommes à votre disposition pour toute autre demande à ce sujet.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments les meilleurs,

Fraternellement vôtre dans le Christ,

Vittorio Francesco Viola

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Sainte Julienne Falconieri

Sainte Julienne peut être considérée comme une seconde fondatrice de l’Ordre des Servites de la bienheureuse Vierge Marie ; les circonstances qui accompagnèrent sa dernière Communion ont enveloppé cette âme séraphique d’un parfum virginal, au point d’en faire l’une des figures les plus attirantes de l’hagiographie eucharistique. On sait en effet, par une ancienne tradition, que la sainte Hostie pénétra invisiblement dans la poitrine de la malade qui ne pouvait communier, car elle rejetait toute nourriture.

La messe est du Commun, sauf la première collecte qui est la suivante : « Seigneur qui, d’une façon merveilleuse, voulûtes réconforter par la nourriture eucharistique votre bienheureuse servante Julienne durant sa dernière maladie ; nous vous demandons par ses mérites que nous aussi, dans cette épreuve suprême, fortifiés par le même Sacrement, nous puissions arriver à la patrie céleste ».

De même que les païens mettaient dans la bouche des morts la monnaie destinée à payer le fret de la barque de Caron, ainsi, au IVe siècle, c’était déjà une ancienne tradition de l’Église romaine, confirmée par un grand nombre de textes des saints Pères, que de réconforter le dernier instant des fidèles par la nourriture eucharistique : Viaticum, que parfois l’on déposait même sur la poitrine des défunts. Par la suite, l’Église modifia cette discipline et déclara qu’il suffisait aux mourants de recevoir comme viatique cette Communion qui suit la Confession et l’Extrême-Onction, sans qu’il soit nécessaire de la renouveler au moment même du dernier soupir. Cette antique coutume romaine reflète cependant la foi énergique du premier âge patristique, où, en face du matérialisme païen, on voulait confesser solennellement le dogme de l’immortalité de l’âme et de la finale résurrection des corps, dont la divine Eucharistie est le gage.

Bienheureux cardinal Schuster

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Le triptyque de sainte Julienne Falconieri en l’église des Sept Saints Fondateurs (des Servites) à Florence, par Giuseppe Cassioli, en… 1934. A droite, la bienheureuse Jeanne Soderini, disciple de Julienne. A gauche, mais oui, c’est sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, et je ne sais pas ce qu’elle fait là.